Sur les traces de son grand-oncle russe devenu américain, disparu on ne sait comment le 5 janvier 1985 dans la forêt chilienne, Douna Loup creuse les méandres des mystères, combats et silences autour de la disparition de Boris. De Moscou au Chili en passant par Boston et la Suisse, l’autrice nous embarque pour un road trip géographique, temporel et introspectif, sous la forme d’un journal de bord.
Pour mettre la main, et surtout des mots, sur cette insaisissable disparition, la baroudeuse et déterminée Douna Loup part à la rencontre des êtres qui ont croisé la route de Boris. Elle espère que la somme de leurs dires et souvenirs l’amènera à comprendre l’énigmatique disparition de ce mathématicien aux multiples facettes. A le retrouver, en quelque sorte. Ou à mieux se retrouver ? «Je suis heureuse d’être là, et de tout ce que cette poursuite d’un autre vivant me fait découvrir d’un autre monde et de moi-même». Douna Loup court après un autre, d’un autre temps, dans lequel il y a pourtant tant d’elle-même. Cet autre, elle apprend aussi à le retrouver dans ses songes, qu’elle retranscrit de mots flottants – des poèmes rêvés, des rêves poétisés. Des mots qui semblent osciller sur cette rivière Los Sauces vers laquelle Boris se dirigeait avant qu’il ne s’évapore dans la nature. Mais celle-ci a ses secrets. Tout comme la colonie Dignidad, cet antre sectaire et totalitaire, située non loin de là. «La volonté d’effacer un passé lugubre scelle les lèvres». Et ce sombre silence, celui d’une enclave cruelle où l’atrocité a supplanté toute dignité, pèse. Les non-dits entremêlés de mensonges forment un nuage opaque qui brouille l’esprit de l’auteure et de son lecteur.
À la recherche de vérités, de réponses cachées, écorchées, et évaporées dans une démocratie écrasée dans le sang. Levantanos. Alors un pas après l’autre, il faut avancer. Et alors peut-être, l’auteure se rapprochera de cette vérité qui devient aussi la nôtre. «Un voyage, c’est toujours la remise en question totale des plans préétablis».
