La librairie Le Temps d’un Livre
Elle avait suspendu le sens, désactivé les vieilles catégories: portrait, autoportrait, paysage, nu. En s’enfermant, elle avait pulvérisé l’espace photographique: ce n’était pas elle qui disparaissait dans l’image, mais toute la vieille photographie qui se désintégrait entre ses mains. Elle avait trouvé une porte secrète par où entrer à l’intérieur de l’image et arrêter sous nos yeux son processus mortifère d’immobilisation du temps. Toutes ses images ne formaient qu’une seule et même grande photographie en mouvement, qui est un film sans histoire et sans retour, immobile et muet.
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Voilà un remarquable roman-hommage à la photographe Francesca Woodman, lectrice de Proust, suicidée en 1981 à l’âge de 22 ans, dont on peut dire que l’œuvre est omniprésente (parfois sans qu’on s’en rendre vraiment compte) et se pose dans une certaine filiation avec celle des surréalistes peut-être. On notera la langue: riche. On sera sensible à la phrase aussi: un déploiement lent, une intelligence. On aime le propos: toujours pertinent, souvent émouvant. Magnifique.