Ricochet rencontre Julia Spiridonova, dite Yulka

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Portrait de Yulka
© Lynda Alexandriiska

Ricochet est allé à la rencontre de Julia Spiridonova dite Yulka, son nom d’artiste. Récompensée à plusieurs reprises pour son œuvre de qualité, cette autrice jeunesse bulgare est très engagée pour l’égalité des chances des enfants. À travers ses livres, elle souhaite leur transmettre «soutien, consolation, magie, amour et la foi que le bien triomphe toujours.»

Virginie Bays: Bonjour Julia Spiridonova! Vous signez vos livres du pseudonyme «Yulka», un prénom bulgare. Pourquoi ce choix? Pourriez-vous vous présenter et nous dire qui est Yulka?
Yulka: Mon premier livre, Гугулетата [Les Gougoulets]*, était hors normes, drôle, déjanté et, de plus, illustré (une fois n’est pas coutume) par l’autrice elle-même. J’avais l‘impression que le nom de Julia Spiridonova se prenait trop au sérieux et seyait davantage à une professeure de maths. Influencée par Janosch – auteur que j’adore! –, j’ai décidé de prendre un pseudonyme artistique. Mes proches m’appellent Yulka – ce nom était donc tout désigné.

Yulka ressemble à ses livres – autant déjantée que profonde. Timide autant que rebelle. Un peu vintage et en même temps autrice qui comprend, aime et respecte les enfants d’aujourd’hui. Je suis si heureuse que cet amour soit réciproque!

 

Avez-vous toujours été attirée par la littérature jeunesse? Quand avez-vous décidé de vous lancer et d’écrire à votre tour vos propres livres jeunesse?
Les livres m’ont sauvé la vie. Mon enfance n’a pas été des plus paisibles. J’avais 6 ans quand le régime totalitaire communiste en place a décidé d’exclure du système mes parents, qui étaient artistes. Encore aujourd’hui, lorsque je traverse une passe difficile, j’ai besoin de m’immerger dans les livres pour enfants.

Petite, je rêvais en secret de devenir autrice jeunesse, sans m’imaginer que ce rêve puisse un jour devenir réalité. Nos invités (les amis de mes parents) étaient de véritables écrivains – et je trouvais que je ne leur ressemblais pas du tout! J’ai osé me lancer dans l’écriture à l’université. Mon premier récit a gagné un concours de l’Unesco (en 1996, Утешителят, [Le Consolant]), puis a paru dans des anthologies en anglais et en français. Je me suis dit: «Il y a de l’espoir, je serais peut-être bien autrice un jour, pour de vrai!» J’ai écrit beaucoup d’autres récits, j’ai commencé un roman, qui, soi-disant destiné à un public adulte, semblait davantage s’adresser aux enfants. J’ai relu mes récits et constaté que tous mes personnages étaient en réalité des enfants! J’ai passé en revue mes livres préférés – pour un livre «adulte» je pouvais citer trois livres pour enfants. Puis, Les Gougoulets sont  arrivés… et voilà où j’en suis à présent!

 

Désormais adulte et écrivaine, que souhaitez-vous transmettre aux jeunes générations à travers vos ouvrages?
Je voudrais leur transmettre ce que moi, enfant, j’en ai reçu: soutien, consolation, magie, amour et la foi que le bien triomphe toujours.

 

Vous écrivez à la fois des livres pour enfants sous la forme d’albums et pour des jeunes adolescents (et jeunes adultes) sous la forme de romans. Comment décririez-vous l’univers de vos albums et de vos romans? Faites-vous une différence dans les thèmes que vous abordez en fonction de l’âge de vos lecteur·ice·s?
Mes livres sont assez variés et abordent des thèmes différents: des livres de contes, une histoire de Noël, une trilogie fantasy, une trilogie policière, même un livre d’après un opéra de Mozart. Mes ouvrages destinés aux plus jeunes sont plus imaginatifs et plus allégoriques, tandis que ceux destinés aux adolescents campent le décor dans des univers plus réalistes. Je classe à part mes romans YA. Ma spécialité, ce sont les histoires amusantes et déjantées que les enfants prendraient plaisir à lire. Mes romans sont un peu tragi-comiques, tout en abordant des sujets difficiles et délicats, voire graves. Un de mes personnages, Kronos (du roman éponyme) est un drogué de 16 ans. Et dans mon dernier roman Сянката на щуреца [L’Ombre du grillon], il est question de la façon dont les terroristes enrôlent des enfants sur le net.

 

Certains de vos textes se présentent comme des contes (Бъди ми приятел [Sois mon ami]*, Приказка за вълшебната флейта [Le Conte de la flûte enchantée], Ножицата [Les Ciseaux]). Est-ce pour vous l’une des formes les plus adaptées pour introduire la lecture chez les enfants?
Le personnage principal est, pour moi, essentiel. Il donne le «la». De lui dépendent le commencement et le déroulement de l’histoire, c’est à lui que je confère le devoir de prendre le lecteur par la main et de l’accompagner à travers mon univers. Mes personnages principaux sont de toutes les sortes – un petit crapaud, un détective privé raté, l’héritier du trône du pays des rêves, une adolescente persuadée d’être la réincarnation d’une comtesse de Transylvanie. Et même une antique paire de ciseaux!

Source:
Virginie Bays, Ricochet, Institut suisse Jeunesse et Médias